Étude Belfius MAHA 2020 : les hôpitaux dans la tourmente
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Comme chaque année, Belfius publie son étude Maha, une analyse des comptes des hôpitaux. L’analyse des experts est sans appel : les structures hospitalières sont ébranlées par la crise sanitaire et leur rentabilité est plus que précaire. En 2020, les hôpitaux pourraient perdre jusqu’à 2 milliards €.
L’étude Maha Belfius 2020 a donc été présentée. Comme toujours, elle porte sur la santé financière des hôpitaux. Les précédentes études attiraient déjà l’attention sur la santé financière précaire de ces structures de soins, mais il est clair qu’avec la crise de la Covid-19, cette fragilité va encore être accentuée.
Réforme structurelle
De ce fait, les banquiers plaident pour une réforme structurelle du financement des soins de santé, une vision partagée par les fédérations du secteur, mais aussi – et c’est réjouissant – par le ministre de la Santé, Franck Vandenbroucke. Les coûts supplémentaires dus à la crise ainsi que l’impossibilité de pouvoir prodiguer les soins habituels pendant le premier confinement (ainsi que pendant la seconde vague) esquissent pour les hôpitaux le risque d’une perte courant de plus de 2 milliards d’euros. On comprend dès lors bien que les compensations promises par le gouvernement pour compenser les effets de la crise sanitaire sont absolument nécessaires.
Insuffisantes
Cela dit, chez Belfius, on estime malgré tout que ces compensations se révèleront insuffisantes pour assainir véritablement le secteur hospitalier. La crise devrait donc être vue comme une opportunité de pouvoir mener une réforme structurelle du mode de financement, un sentiment que partage notamment la fédération hospitalière Unessa qui prône en outre conjointement une réorganisation des soins.
L’analyse
Selon l’étude de Belfius, la situation financière des hôpitaux est inquiétante. Le bénéfice 2019 reste très maigre et il avait déjà été signalé par le passé qu’une perturbation mineure pourrait avoir des conséquences catastrophiques dans le secteur. Il est clair que cette situation difficile met également la capacité d’investissement sous pression. Or les investissements sont la clé de soins de santé de qualité. Sur les 87 hôpitaux généraux étudiés, 30 sont déficitaires, soit un tiers. C’est une réalité constatée depuis des années. Et sur ces 87 hôpitaux, 17 seulement ont un résultat courant de plus de 2% du chiffre d'affaires, niveau qui est considéré comme un critère de santé financière. En 2019, 16 hôpitaux n'ont pas assez de cashflow pour rembourser la dette qui arrive à échéance au cours de l’exercice. L’un d’entre eux a même un cashflow négatif. Ceci reste donc assez stable : en 2018, 18 hôpitaux avaient trop peu de cashflow, dont 2 un cashflow négatif. De manière générale, les bilans financiers des hôpitaux peuvent être qualifiés de sains, avec des fonds propres, hors subsides d'investissement, de 23,6 %, ce qui est un peu mieux qu’en 2018 (23,1 %), et toujours supérieur à la valeur cible, de 20 %. Le chiffre d'affaires a augmenté presque autant qu’en 2018, soit 5 %, à 16,13 milliards. L’analyse des sources de ce chiffre d'affaires montre une contribution importante des produits pharmaceutiques.
La crise Covid-19
Les plans d'urgence activés dans les hôpitaux ont un impact considérable sur leur activité habituelle et entraînent la disparition de nombreux revenus. Le nombre de consultations a chuté à 43 % de l’activité habituelle pendant le premier plan d’urgence hospitalier (du 16 mars au 5 mai). Durant cette période, le nombre d'admissions est tombé à 59%. Le nombre de jours d'hospitalisation diminue moins fort, car les patients Covid-19 restent hospitalisés plus longtemps.
Les hôpitaux ont fait face à des surcoûts substantiels. Ils ont acheté du matériel de protection, fait appel à du personnel intérimaire, adapté leur infrastructure pour séparer les patients Covid-19 des autres, etc. Par ailleurs, certaines charges ont diminué : achats pharmaceutiques moindres, activité réduite des services de facturation, diminution des achats de denrées alimentaires, etc. Du côté des recettes, les médecins ont facturé moins d’honoraires d’opérations, de consultations, etc. La pharmacie a également enregistré moins de revenus et les parkings payants des hôpitaux étaient en grande partie vides.
L’effet sur le résultat courant dans le « Base Stress » scénario est inquiétant. Les hôpitaux interrogés (généraux et universitaires) terminent avec un résultat courant négatif de 5,6 % par rapport au chiffre d'affaires. Si nous y ajoutons la deuxième vague de contaminations, plus grave, ce résultat courant négatif plonge même à 11,2 % par rapport au chiffre d'affaires. Les hôpitaux généraux et universitaires réalisent ensemble un chiffre d'affaires d’environ 20 milliards d’euros. Cela représente potentiellement une perte courante de plus de 2 milliards d’euros pour l’ensemble du secteur. Il va de soi que ces chiffres doivent être pris avec une grande prudence, mais ils fournissent en tout cas une indication de la perte particulièrement importante que doivent supporter les hôpitaux. Notons que ces projections ne prennent pas en compte les compensations prévues par l’état fédéral et les régions.
Conclusion
Selon Belfius, l'impact de la crise Covid-19 est particulièrement lourd dans un contexte où les hôpitaux belges doivent procéder à d'importants investissements. La banque conseille le secteur d’investir dans des solutions digitales et l’informatisation pour gérer les données des patients, de façon sécurisée. Le vieillissement croissant de la population va engendrer de nouveaux besoins. Le nombre de polypathologies et de malades chroniques va augmenter. Les hôpitaux devront aussi intégrer diverses innovations médicales. Et ils sont aussi censés devenir neutres en CO2. La constitution de réseaux interhospitaliers devra déjà permettre d'améliorer la collaboration et de créer une offre commune. Ces réseaux constituent sans doute une pièce du puzzle de la solution future. Et Wallonie Santé est plus que jamais un partenaire pour les investissements en infrastructures, mais aussi en travaux énergétiques grâce au nouveau prêt Green Health à taux plancher.
Retrouvez le communiqué de presse MAHA Belfius 2020 ci dessous.
Pour visualiser la présentation Powerpoint de l’enquête MAHA Belfius 2020, rendez-vous ci-dessous.