Abbaye d’Oignies : Reconversion de valeur
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Valoriser le patrimoine wallon à travers une structure à vocation sociale et d’avenir : voilà le projet de la réhabilitation de l’ancienne abbaye d’Oignies et sa transformation en maison de repos. À terme, 85 places devraient être disponibles.
À Oignies (Tamines), le projet porté par Hans Eckeman est d’envergure. Il s’agit en effet de créer une nouvelle maison de repos en réhabilitant l’ancien Prieuré de la ville, une bâtisse inoccupée depuis plus de 40 ans et qui bénéficie d’un classement depuis 1975. L’endroit est entré dans l’histoire pour avoir accueilli les créations d’Hugo d’Oignies, dernier des grands orfèvres de l'Art mosan. Longtemps laissé à l’abandon, le site va donc connaître une nouvelle jeunesse en se transformant en lieu de vie pour nos aînés. Il s’agit d’un projet novateur qui s’appuie sur une valorisation patrimoniale et historique pour un faire un lieu d’accueil d’exception et dont la philosophie rejoindra celle d’un « hôtel de soins ». Et ce n’est pas tout : le projet d’Oignies revêt aussi une dimension sociale inclusive par le biais d’interactions qui s’opéreront avec les quartiers avoisinants. L’idée est notamment de proposer aux aînés d’assurer une école de devoirs, un potager local ou l’élevage de quelques animaux. Aujourd’hui, tous les feux sont au vert pour le démarrage de ce projet : le permis pour la rénovation et la transformation du Prieuré en maison de repos a été obtenu fin 2019 tandis que l’AVIQ a également donné son accord pour la création des 85 places classées « MR ». WALLONIE SANTÉ s’est engagée aux côtés des investisseurs et de la banque CBC dans ce projet de valeur qui, outre ses qualités intrinsèques, s’inscrit au cœur des besoins d’accueil dans une région à forte densité de population. Echange avec l'un des porteur du projet, Hans Eckeman.
Vous avez acquis une grande expérience dans le domaine de l’accueil des aînés. Comment ?
Après quelques années comme infirmier à l'Hôpital Brugmann, je me suis orienté vers le secteur des maisons de repos. En 1990, j'ai eu l'opportunité de devenir responsable d'une petite structure de 20 lits à Bruxelles. J'ai acheté le fonds de commerce après 4 mois et, dans le même temps, j'ai acheté avec des associés 8 autres appartements pour les transformer en maison de repos (50 lits). Dès 1991, nous avons ouvert la Résidence Andante. En 1996, j'ai quitté Bruxelles pour Ottignies où nous avons transformé l'ancienne Clinique Saint-Pierre en maison de repos et de soins. Le Chenoy avait une capacité de 108 lits. En 2005, notre association gérait au final 5 maisons de repos à Bruxelles, en Wallonie et en Flandre, soit 425 lits. Nous avons été en quelque sorte les précurseurs des grandes structures ou groupes qui existent aujourd’hui.
Nous avons revendu nos activités en 2007, mais nous avons continué nos carrières respectives au sein des grands groupes. Jusqu’à gérer 30 maisons de repos en même temps. Puis, je suis revenu à une structure plus familiale que j’ai terminé de transformer en 2014. Le projet de l’Abbaye d'Oignies s’est présenté par la suite. Nous y travaillons avec 5 associés et nous sommes convaincus que l’on peut faire de cet ancien prieuré un lieu d’exception, une maison de repos exemplaire et unique en son genre.
Le secteur de l’accueil des aînés constitue un enjeu important. Quelle est votre vision sur les perspectives du secteur ?
La proportion de personnes âgées va augmenter dans les années à venir. Cela dit, on peut se demander à quel niveau se situera la demande de lits en maison de repos ? Les personnes âgées rentrent de plus en plus tard en maison de repos. Il y a 5 ans, un séjour moyen durait 3 ans, mais il a diminué à 2 ans et 2 mois aujourd’hui, soit une réduction de 30%. C’est le résultat à mon sens de deux facteurs : l'augmentation des prix d'hébergement et le développement des soins à domicile. On peut donc se poser la question de l’avenir. Cela dit, il y a des solutions. La personne qui entrait il y a 10 ans en maison de repos pour ne plus être seule la journée pourrait très bien aujourd’hui intégrer une petite unité de vie, comme une résidence-services ou une maison dite « kangourou » qui regroupe plusieurs générations. Ces nouvelles unités de vie doivent offrir de l’agilité : être proche d’une MRS si des soins sont nécessaires tout en étant proches d’un lieu central pour rester actif dans la société. Je pense globalement que trois grands défis nous attendent : il faut à la fois veiller à ce que les prix des hébergements dans une maison de repos restent abordables tout en rendant les soins à domicile plus performants et en s’occupant de trouver des solutions au problème de la solitude tandis qu’il faut aussi tirer les leçons de la pandémie en renforçant les capacités de personnel en cas d’urgence.
Quelle distinction faites-vous entre une maison de repos et un hôtel de soins ?
J’utilise le terme « hôtel de soins » depuis 25 ans. Pour moi, il n’y a pas de distinction à faire. Car chaque maison de repos doit pouvoir donner des soins « à la carte » propres aux besoins de chaque résident. Mais il n’y a pas que les soins. Il y a aussi la notion d’hôtel : un lieu de confort doté d’une certaine esthétique et une équipe de professionnels qui œuvre dans le respect et dans un juste équilibre.
Le projet de rénovation de l’abbaye d’Oignies n’est pas banal. Quelle valeur ajoutée pensez-vous pouvoir apporter ?
Dans plusieurs décennies, un bâtiment historique aura toujours une allure majestueuse, un aspect qu'une nouvelle construction perd beaucoup plus rapidement. Bien entendu, les investissements en rénovation sont plus élevés que pour le neuf. Mais l’âme du lieu reste unique. En outre, le site d’Oignies offre une superficie de 4 ha, ce qui nous laisse avec des possibilités d’évolution.
On imagine que les bâtiments feront appel aux technologies actuelles en matière énergétique ?
Ça nous a pris des mois pour trouver des solutions, c’est-à-dire des plans qui respectent à la fois les normes PEB, d’incendie et de législation en matière de MRPA. Mais nous tenons le bon bout. Les nouvelles technologies telles que la géothermie, une isolation performante, l’énergie seront utilisées avec intelligence et donc dans le respect de l’environnement. C’est absolument nécessaire par ailleurs pour conserver des prix accessibles.
Vous avez d’autres projets de reconversion pour le site. Ce ne sera pas seulement une maison de repos ?
Nous évaluons actuellement plusieurs possibilités. Dans l'abbaye, il reste 1.000 m² qui ne sont pas encore affectés. On pourrait y créer un béguinage moderne, ce qui serait un sacré clin d’œil au passé puisqu’à la fin du 12e siècle, Marie d'Oignies avait fondé un « proto béguinage ». Pour l’extension, une partie de l’espace deviendra des résidences-services ainsi que quelques appartements destinés à devenir des habitations kangourou. Par ailleurs, si la commune nous suit sur l’idée, on pourrait aussi réutiliser les charpentes métalliques comme volières afin d’ouvrir un centre de revalidation pour oiseaux sauvages blessés. Les projets sont nombreux.
Comme WALLONIE SANTÉ vous a-t-elle soutenu dans vos besoins financiers autour de ce projet ?
Nous ne connaissions pas WALLONIE SANTÉ. C'est la CBC qui nous a fait découvrir cet outil financier. Dès le début, une confiance s'est installée entre les différentes parties : WALLONIE SANTÉ, la CBC et notre structure (MKBH). La connaissance du secteur par l’équipe de WALLONIE SANTÉ a clairement été un plus. En outre, je pense que la CBC ne nous aurait probablement pas suivis sans le soutien de WALLONIE SANTÉ.
Fiche technique
Institution : ASBL ABBAYE D’OIGNIES (Labory 51 SRL)
Secteur : Privé associatif
Type : Maison de repos
Nombre de lits : 85
Année de lancement des activités : 2013
Localisation : Rue de l'Abbaye 48-12, 6250 Aiseau-Presles
Site web : en développement